TAEKWONDO / PASCAL GENTIL :
« La compétition n’est pas toute ma vie »
09 septembre 2004 - Aurélien CANOT

 


Encore battu à une marche de la finale olympique, c’est un Pascal Gentil toujours suspicieux par rapport à l’arbitrage « à la coréenne » qui nous a rendu visite. Deux fois « bronzé » en huit ans, le Français veut maintenant profiter de ses proches avant de remettre la tête dans le guidon.

Pascal Gentil, avec quel sentiment êtes-vous revenu des JO cette fois ?
Avec toujours un petit goût amer au fond de la bouche. Une seconde fois médaille de bronze, un arbitrage un peu limite, des points qui ne s’affichent pas. En même temps, je reviens avec une médaille, ce que tant d’athlètes auraient aimé avoir. Mais, moi, ce bronze me déçoit car je voulais l’or. Maintenant, les Jeux c’était très fort humainement car il y a eu beaucoup d’échanges. Je suis très content d’y avoir participé et je donne d’ores et déjà rendez-vous pour 2008.

En demi-finale, vous aviez pourtant en face de vous un Moon Dae Sung à votre mesure ?
Complètement. Le Coréen était à ma portée. Il avait un peu fait le festival face aux autres adversaires. Face à moi, il n’a pas trop fait le spectacle. Il a eu du mal car j’étais bien concentré. Les gens ont à chaque fois tendance à se demander ce que les arbitres ont après moi. En fait, je n’ai pas de problème avec l’arbitrage.

D’où vient le problème alors ?
Le souci c’est qu’ils veulent faire le jeu des Coréens. A chaque fois, je passe le dernier jour de la compétition et j’affronte le dernier Coréen encore en lice. Comme, en général, les autres Coréens n’ont pas fourni de belles prestations… C’est toujours la même chose : il faut absolument qu’un Coréen revienne auréolé de la médaille d’or. C’est pour ça que je passe à chaque fois à la trappe.

Une défaite en demi-finale des JO face à un Coréen, c’était du déjà vu pour vous. Malheureusement…
Je revis la même chose, sauf que j’ai progressé. A Sydney, j’étais un peu comme un chien fou, je frappais dans tous les sens. Là, j’avais toute une stratégie simple : il fallait que je sois chirurgical, que je frappe fort et précisément, ce que j’ai fait. C’était beaucoup plus flagrant qu’à Sydney où j’avais les jambes qui partaient dans tous les sens et où le public ainsi que les arbitres ne pouvaient pas vraiment se rendre compte des impacts.

« J’y ai cru jusqu’à la dernière seconde »

Là, à Athènes, les impacts semblaient très clairs ?
Oui, cette fois-ci, les points auraient dû être comptabilisés. J’y ai cru jusqu’à la dernière seconde. Le Coréen aussi, puisqu’il n’arrêtait pas de se jeter par terre, de reculer et de m’agripper sans cesse au plastron pour m’empêcher de développer les jambes. Paradoxalement, j’étais trop serein sur ce combat. J’y ai tellement cru qu’il manquait peut-être ce petit grain de folie qui, à Sydney, a fait que j’ai pu faire plusieurs KO, ce qui est très difficile à ce niveau de la compétition.

Tout n’a donc pas été si négatif que cela, hormis le résultat final qui vous fait un peu défaut ?
Je suis très content de ma prestation, je n’ai vraiment rien à me reprocher : j’ai fait ce qu’il fallait. En fait, j’avais tous les rôles : j’étais arbitre, puisque à chaque fois que je mettais des impacts et que les points n’étaient pas culpabilisés, je discutais avec l’arbitre central pour lui dire : « Attendez, si là il n’y a pas point, il n’y aura jamais point ».


J’ai été également très combatif, car j’avais un très bon Coréen en face et j’étais concentré dans mon combat. D’ailleurs, j’avais intérêt car, à un moment, il a essayé de me frapper au visage et c’est passé à quelques millimètres de mon casque. Comme, en même temps, j’ai fait le spectacle durant les autres combats, j’avais un peu toutes les étiquettes.

Ne regrettez-vous pas quelque part d’adopter souvent un comportement susceptible d’agacer l’arbitre ?
L’arbitre n’a rien contre moi. Simplement, pour pouvoir être où il est, c’est à dire devant les caméras de la terre entière, l’arbitre a dû faire un stage en Corée et passer maintes et maintes fois devant des Coréens, auxquels il a dû faire des courbettes. Et il arrive en demi-finale des Jeux avec un Coréen face à un Français.

« L’arbitre se fout du petit Français »

Qu’entendez-vous par là ?
Le « petit » Français, l’arbitre s’en fout. Même si c’est une star et que, médiatiquement, c’est celui qui fait le plus de bien au taekwondo. Tout ce que voit l’arbitre c’est le Coréen qui lui a permis d’être là. Une victoire du Coréen est donc une offrande ou un cadeau supplémentaire pour les Coréens.

Pensez-vous qu’un Pascal Gentil « chien fou », comme à Sydney, aurait eu plus de chance de se qualifier pour la finale ?
Non, je ne pense pas. L’expérience de Sydney m’avait déjà servi d’exemple. J’ai perdu 7-2, alors que je tapais dans tous les sens. Mais le compteur était bloqué et ils ont juste lâché un ou deux points à la fin du combat. Alors que, là, j’étais toujours au contact et ai même mené le combat à un moment. Après, il suffit d’une touche. Si les arbitres appuient une fois de plus pour le Coréen et qu’ils me laissent à quatre, je ne peux pas gagner comme ça. En plus, le KO, plus on le cherche et moins on arrive à l’obtenir.

Vous semblez désormais vouloir plus vous recentrer sur votre vie extérieure au taekwondo ?
Bien sûr, et heureusement. Sinon, je ne pourrais pas évoluer. J’ai une fille qui a 19 mois, ma famille qui m’entoure et aussi tous mes amis qui m’aiment et qui me soutiennent dans le taekwondo. La compétition, je vais continuer, je vais encore essayer de ramener des médailles pour la France, mais ce n’est pas toute ma vie.

De quoi va être fait votre avenir le plus proche ?
On remet les compteurs à zéro et on repart sur des Coupes de France, championnats de France et championnats du Monde dans six mois. L’année prochaine, ce sera les championnats d’Europe.



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